Victor Hugo, Les Orientales.
Les Têtes du sérail, Orientale I.
Les Têtes du sérail (format pdf)
O horrible!
O horrible! most horrible! Shakespeare,
Hamlet .
Le
dôme obscur des nuits, semé d'astres sans nombre,
Se
mirait dans la mer resplendissante et sombre;
La
riante Stamboul, le front d'ombres voilé,
Semblait,
couchée au bord du golfe qui l'inonde,
Entre
les feux du ciel et les reflets de l'onde,
Dormir dans un globe étoilé.
On
eût dit la cité dont les esprits nocturnes
Bâtissent
dans les airs les palais taciturnes,
A
voir ses grands harems, séjours des longs ennuis,
Ses
dômes bleus, pareils au ciel qui les colore,
Et
leurs mille croissants, que semblaient faire éclore
Les rayons du croissant des nuits.
L'oeil
distinguait les tours par leurs angles marquées,
Les
maisons aux toits plats, les flèches des mosquées,
Les
moresques balcons en trèfles découpés,
Les
vitraux se cachant sous des grilles discrètes,
Et
les palais dorés, et comme des aigrettes
Les palmiers sur leur front groupés.
Là,
de blancs minarets dont l'aiguille s'élance
Tels
que des mâts d'ivoire armés d'un fer de lance;
Là,
des kiosques peints; là, des fanaux changeants;
Et
sur le vieux sérail, que ses hauts murs décèlent,
Cent
coupoles d'étain, qui dans l'ombre étincellent
Comme des casques de géants.
Victor Hugo, Les Orientales, III.
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